“Activer le quotidien”

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Comment êtes-vous arrivé à ce projet de véhicule intermédiaire? Pierre Francis: L’idée a germé dans les années 2005-2006, à Paris. L’intui- tion, c’est que la voiture me semble être une des plus grandes erreurs des Occi- dentaux car elle est mauvaise pour la santé et pour la planète. On oublie sou- vent que la sédentarité est la quatrième cause de mortalité mondiale. Je voulais donc mettre au point un véhicule où le conducteur ne soit pas passif. D’ailleurs, à l’époque, on ne parlait pas de véhicule intermédiaire mais de véhicule actif!

Pourquoi lancer ce projet à Annecy ?Parce qu’en m’installant ici avec ma famille pour pouvoir nager, randonner, pédaler ou skier, ce concept m’a paru une évidence. Beaucoup d’amis roulent plus de 80 km par jour pour aller tra- vailler en Suisse et ils en ont tous marre. Beaucoup d’Annéciens pratiquent des sports outdoor mais la distance est trop importante pour assurer ce trajet quoti- diennement en vélo. Même s’ils le font quelquefois aux beaux jours.

Remplacer la voiture pour ces trajets, c’était votre cahier des charges ?Oui. Créer un véhicule capable de rou- ler ces 80 km à 120 km/h sur autoroute, qu’il pleuve, vente ou neige. Tout en nécessitant un effort physique de son conducteur. On parle désormais de véhicule intermédiaire. Il y a même une association à laquelle on a adhéré. Mais ce concept de véhicule actif a survécu dans l’expression “mobilités actives”.

Certains sceptiques voient cela comme des sous-voitures ou des tuk-tuks !On ne s’est pas demandé si on allait faire ou pas la voiture de la famille Pierrafeu. Au contraire, on a conçu un véhicule très technologique. Ces véhicules intermédiaires commencent à être identifiés grâce à l’Extrême Défi de l’Ademe lancé pour encourager l’invention de nouvelles solutions de déplacement. Et quand on échange avec la BPI ou France 2030, on est écoutés. Cixi a aussi été labellisée Deep Tech, ce sont des entreprises risquées qui nécessitent de forts capi- taux. Mais on est en avance de phase car on n’en est plus au premier pro- totype. Après huit ans de recherche et développement, on va même passer à l’industrialisation dans une usine toute neuve de 7 000 m2 sur trois niveaux à Poisy, près d’Annecy.iPourquoi êtes-vous resté aussi discret depuis 2015 ?Parce qu’avant de parler, on a d’abord voulu montrer ce qu’on savait faire ! Plutôt que de se positionner comme une start-up avec des promesses qu’on ne peut pas tenir. Il faut préciser qu’on a pu fonctionner en auto-financement car ce n’est pas ma première entreprise. On a pu investir plusieurs dizaines de millions d’euros sans compromis.

A quoi ressemble votre véhicule actif ?On ne dévoile pas encore le design définitif mais je peux vous assurer qu’on a souhaité concevoir un objet désirable. Même si nos arguments sont justes en termes de santé et d’environnement, on sait bien qu’on ne convaincra pas grand monde avec un véhicule moche. Cela a été ma principale préoccupation avant la création de l’entreprise. J’ai contacté Carlos Arturo Torres Tovar car il avait remporté, en 2008, le concours de design Peugeot. La commande c’était de présenter un projet pour les “mégalopoles de demain”. J’ai longtemps eu son véhicule comme fond d’écran sur mon ordinateur et je me suis dit que si on arrivait à faire aussi beau, j’arriverai à le vendre !

Carlos Arturo Torres Tovar a accepté votre proposition?Oui. Après être venu passer quelques jours à Annecy lors de vacances en Europe, il s’est installé à son tour ici. Aujourd’hui, on est associés!

Votre Vigoz, c’est un super vélo ou mini-voiture ?Le Vigoz est clairement plus proche d’une voiture, même s’il est un plus court, avec 3m de long, et deux fois moins large, soit environ 1m. Il permet d’emporter deux personnes avec un système de roulis actif qui l’empêche de se coucher. On s’est appliqué les normes de crash-test de la catégorie M, donc des voitures. On a dépensé plus un million d’euros dans plus de 200 crash-tests. A l’avant, une zone de déformation absorbe les chocs fron- taux. On ne cherche pas les 5 étoiles qui exigent d’autres équipements mais on est allés au-delà de ce qui est obliga- toire dans cette catégorie L5EA.

D’autres innovations que ce système de roulis actif?Une direction et un pédalier électro- nique. On va commercialiser ce pédalier électronique indépendamment du Vigoz en le proposant aux construc- teurs de tous les types de vélo, y com- pris les vélo cargo car cela permet de se passer totalement de chaine. On en supprime donc les inconvénients. Plus de salissure, plus de changement au bout de quelques milliers de km...

Quand allez-vous sortir les premiers Vigoz ?On a créé deux chaînes d’assemblages pour fournir deux business unit dans notre usine. La première fabriquera des pédaliers électroniques dès 2024, avec une capacité de 50 000 pièces par an, et la deuxième des Vigoz pour fin 2025 avec une production annuelle qui pourra atteindre les 2 000.

Le prix du Vigoz ?Je ne peux pas encore révéler son prix définitif mais on a des premiers contacts pour des flottes d’entreprise de la région. Sauf exception, ce sera plutôt une clientèle BtoB. On va les proposer seulement en location avec un prix qui baisse de 1% par an, et assurer la récu- pération et le recyclage de ces véhicules quand les gens ne s’en serviront plus. On étudie plusieurs scenarii pour un déploiement national puis européen.

Et aujourd’hui, vous avez décidé de sortir de l’ombre ?Oui. Vous êtes le premier journaliste à qui je réponds. On a prévu plusieurs évènements cette année 2023 pour pré- senter nos innovations technologiques : Eurobike à Francfort fin juin, le salon du vélo Pro-Days à Paris début juillet... On a aussi accepté la proposition de l’Europe de participer à la croisière The Arch qui présente 100 inventions pour un futur durable, avec un circuit de la Grèce à Copenhague en passant par Marseille. Nous, on sera à Copenhague.

Rencontrez-vous des réticences face à ce type nouveau véhicule ? Rarement. Certaines personnes me disent qu’il est hors de question qu’elles pédalent. Cela dépend du rapport de chacun à l’effort. La fatigue que pro- cure une sortie avec ce type de véhicule n’a rien à voir avec celle d’un voyage en voiture. C’est de la bonne fatigue. Mais l’assistance électrique assurera l’essen- tiel pour permettre un usage quotidien. Le conducteur ne fournira qu’une partie de la puissance. On aurait pu mettre une manette d’accélération comme sur une trottinette mais on ne l’a pas fait! Le Vigoz est conçu pour ne pas avan- cer si on ne pédale pas. On doit fournir une partie de l’effort même si ce n’est que 2% quand on est à 120 km/h en cote sur autoroute.